A côté des gelées, des conditions climatiques favorables

ble_epiaison5Après avoir atteint des records de douceur jusqu’au 1er mars, les températures sont nettement redescendues et se rapprochent aujourd’hui de celles rencontrées l’an dernier à la même époque. Quelles conséquences sur l’élaboration des composantes de rendement ?

Les conditions climatiques pendant l’automne et l’hiver ont fait arriver les stades épi 1 cm de 1 à 3 semaines plus tôt que la date médiane pluriannuelle mais avec des hétérogénéités très contrastées entre variétés, périodes de semis et régions.

Les conditions de températures et de rayonnement très supérieures à la normale ont en effet conduit à une précocification du stade épi 1 cm, très marquée sur les variétés insensibles à la durée du jour.

Mais depuis le 1er mars, la tendance « année plus chaude » (> décile 8 ou 9) observée depuis les semis a basculé en « année plus froide » (entre médiane et décile 2), avec des températures moyennes régulièrement inférieures d’un degré à la normale saisonnière (figure 1). Dans certains cas, les parcelles qui n’étaient pas encore à épi 1 cm ont considérablement ralenti et il aura fallu parfois plus de 2 semaines pour que l’épi monte dans la tige de 2 mm.

 

Figure 1 : Evolution mensuelle des écarts à la moyenne de la température de novembre 2015 à avril 2016

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Un scénario climatique à l’origine de stades très étalés

Compte-tenu des conditions très chaudes de l’automne et l’hiver, les apex ont initié beaucoup d’ébauches de feuilles avant que la transition florale ne se réalise ; de plus, les conditions de redressement et de tout début de montaison ont mis à mal l’habituelle coordination 2 nœuds – F2 définitive pointante.

Au bilan, les stades sont difficiles à qualifier, et plus tardifs que ce qu’on aurait pu prévoir il y a 3 mois. Dans certaines régions au nord de la France, quelques jours de retard sont même parfois observés par rapport aux dates médianes pluriannuelles.

Aujourd’hui, les stades du blé tendre des principales zones de production françaises s’étalent donc de l’épiaison (voire floraison) pour le tiers sud de la France, à dernière feuille pointante ou étalée pour le quart Nord-Est (figure 2).


Figure 2 : Dates prévues des stades « dernière feuille étalée » (gauche) et « épiaison » (droite) sur blé tendre d’hiver

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Une fin de montaison favorable à l’élaboration de la biomasse

La montaison a donc été globalement fraîche ce printemps, à l’exception de quelques rares épisodes plus chaud (week-end du 8 mai par exemple). Mais il ne s’agit pas des seuls éléments climatiques remarquables pour la mise en place du potentiel de rendement :

– Les rayonnements cumulés en mars et début avril sont dans l’ensemble faibles (figure 3). Mais ils sont associés à des températures fraîches si bien que les quotients photothermiques sont élevés (figure 4), ce qui est généralement gage d’une bonne croissance et favorable à la fertilité épi. Par ailleurs, les rayonnements ont été élevés au cours des trois dernières semaines (supérieurs à la médiane), et toujours associés à des températures plus basses que la moyenne. On se retrouve donc sur une fin de montaison favorable à l’élaboration de la biomasse et des composantes de rendement


Figure 3 : Evolution mensuelle du rapport à la moyenne pluriannuelle du rayonnement mensuel de novembre à avril

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Figure 4 : Niveau du rapport Rayonnement/Température (quotient photothermique) calculé du 01/03 au 10/05, en pourcentage de la médiane pluriannuelle

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Un risque de stress hydrique sur les terres superficielles de l’Ouest

– L’alimentation en eau a été très bonne autour et après épi 1 cm, ce qui a permis en général de bonnes valorisations des apports d’azote, et un bon début de montaison (pas de déficit hydrique constaté pour le moment, à l’exception du Sud-Est. Evidemment, la semaine du 1er au 8 mai, sèche, ensoleillée et un peu plus chaude, a fait rapidement chuter les réserves en eau du sol, mais des pluies significatives sont prévues jusqu’au 12 mai. Si ces prévisions de pluie se réalisent, les cultures de l’Est de la France seront bien alimentées en eau lors de leur fin de montaison et pendant leur floraison. Par contre, la façade Ouest semble ne pas bénéficier des pluies prévues ces jours-ci ; les situations les plus superficielles vont donc être confrontées à court terme à des stress hydriques (figure 5).


Figure 5 : Niveau de remplissage (en % de la RU) des réserves en eau des sols au 15/05, compte-tenu des prévisions de pluie au 10/05 – Type de sol adapté à la région

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Des inquiétudes pèsent sur la composante « nombre de grain par épi »

– Les chutes de températures de la dernière décade d’avril restent aujourd’hui une source d’inquiétude : il a gelé plusieurs jours de suite dans de nombreuses régions (figure 6), alors que les cultures étaient à des stades sensibles. Les zones les plus touchées en fréquence de jours de gel comme en minima atteints sont la Normandie (Basse et Haute), le nord de la Beauce, la Picardie, la Lorraine, et dans une moindre mesure la Champagne, la Bourgogne, la Sologne et le nord-Auvergne.

Au total, 63 % des stations de notre réseau ont relevé des températures négative sur la période 15/04-05/05, mais elles ne sont descendues en dessous de -2°C que dans 11 % des cas. Pour le moment, il est trop tôt pour annoncer d’éventuels dégâts, et préciser leur étendue. S’ils sont effectifs, ce sera la composante « nombre de grains/épi » qui sera touchée, avec peu de capacité de compensation.

 
Figure 6 : Nombre de jours de gelées (T mini inférieure à 0°C, relevée sous abri) entre le 15/04 et le 05/05

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Jean-Charles DESWARTECécile GARCIA (ARVALIS – Institut du végétal)