La chute des températures et les franches gelées annoncées cette semaine présentent quelques similarités avec 2012. Mais la situation ne semble pas aussi critique.
Jusqu’à présent, l’hiver s’est caractérisé par une quasi-absence de gelées et un mois de janvier particulièrement doux. Cette douceur continue depuis Noël confirme, pour le moment, la relative précocité de la campagne 2017-2018 : à date égale (24 janvier), le cumul de températures positives depuis le semis est supérieur aux normales pluriannuelles sur pratiquement tout le territoire. La douceur relative de la semaine dernière n’a fait qu’accentuer cette précocité.
Carte 1 : Ecart du cumul de températures (températures moyennes supérieures à 0°C) entre la campagne 2017-2018 et la médiane 1997-2016 pour la période semis 24 janvier, en °Cj – Hypothèses des dates de semis régionalisées
Le contexte actuel rappelle le scénario de janvier-février 2012, où une vague de froid s’est brusquement installée sur la France après un début d’hiver doux. Cette année-là, il avait été démontré qu’une partie des dégâts était liée à l’avance anormale de la végétation pour une fin janvier : les cumuls de températures étaient proches des maximales historiques. Cette année, le cumul de températures depuis les semis est relativement similaires à 2012 (au détail près que les semis de l’automne 2011 avaient été anticipés de 5 jours environ).
Figure 1 : Evolution décadaire des cumuls de température depuis le 10 octobre, en °Cj, pour les campagnes 2017-2018 et 2011-2012, et la médiane 1997-2016 – Station de Fagnières (51)
Sur un grand quart Nord-Est, les céréales 2018 sont à des stades de développement égaux ou tout juste inférieurs à 2012.
Cependant, à la différence de 2012, les températures annoncées sont nettement moins froides cette semaine : -6°C par exemple annoncé à Chalons-en-Champagne, alors que le mercure descendait à -12 – -14°C il y a 6 ans. Cette moindre intensité du froid devrait normalement garantir l’absence de dégâts de gel généralisés cette semaine. Par contre, dans l’hypothèse où le froid poursuivrait son offensive, avec des températures plus basses, des conséquences seraient à craindre sur les cultures les plus avancées et les variétés et espèces les moins résistantes.
Figure 2 : Evolution simulée de la résistance au froid d’un blé assez sensible (note = 4), semé le 10/10/2017 pour la station de Fagnières (51) – Modèle d’estimation de la résistance au froid INRA – Ch. Lecomte
Attention à la combinaison gel et sols engorgés
Les considérations ci-dessus se focalisent sur le seuil critère thermique. Il faut toutefois rajouter l’engorgement en eau des sols comme facteur aggravant. Même si on peut espérer un relatif assainissement des couches superficielles du sol grâce au temps moins pluvieux de ces derniers jours, il subsiste des teneurs en eau dans les sols très souvent au moins égales à la capacité au champ. Dans des sols qui peuvent se souffler facilement comme les craies de Champagne, des déchaussements peuvent apparaître. De la même façon, les sols caillouteux (Lorraine, Bourgogne) peuvent engendrer des gels mécaniques sur les plantes et sectionner certains organes. Cela est à surveiller d’autant plus que des alternances gel-dégel sont annoncées chaque jour de la semaine.
Jean-Charles DESWARTE (ARVALIS – Institut du végétal)