Pour une conduite économe et performante des céréales à paille : Piloter la fertilisation azotée plutôt deux fois qu’une en 2017 !

Avec des reliquats azotés de sortie d’hiver élevés, les doses prévisionnelles calculées a priori peuvent être parfois très faibles voire nulles. Comment gérer la fertilisation azotée des céréales dans ces situations ? 

Pourquoi de tels niveaux de reliquats cette année ?

Les reliquats d’azote minéral du sol en sortie d’hiver (RSH) sont exceptionnellement élevés cette année dans la plupart des régions françaises. Seuls les sols filtrants semblent ne pas être concernés.

Ce phénomène n’a rien à voir avec les résultats de la récolte 2016. Il est à mettre au regard de la faible pluviométrie hivernale (figure 1) : l’absence de lessivage a permis le stockage de l’intégralité du nitrate issu de la minéralisation de l’humus des sols.


Figure 1 : Les reliquats azotés du sol en sortie d’hiver sont étroitement liés à la pluviométrie hivernale
Exemple des RSH mesurés après un précédent blé en sols profonds de Beauce.

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La quantité est d’autant plus importante que la date de récolte du précédent a été précoce (reliquats plus élevés après colza ou blé plutôt qu’après maïs ou betterave). La grande variabilité de ces valeurs par précédent s’explique par des écarts de teneurs en matière organique des sols, de pluviométrie ou de niveau de fertilisation azotée du précédent.

Rappelons que cet azote n’est efficace pour la culture que si son système racinaire lui permet de l’utiliser. Si l’azote minéral du sol était en profondeur au moment de la mesure du reliquat, il est encore possible qu’une forte pluviométrie au cours des prochaines semaines mette une partie de cet azote hors de portée des racines. Dans ce cas, il sera temps de réévaluer ces reliquats avec des modèles de lessivage.

Au-delà de leurs niveaux élevés en moyenne, les RSH montrent également une grande variabilité cette année. Un reliquat moyen derrière colza en sol profond de 100 kg N/ha masque des valeurs parcellaires allant de 20 à 250 kg N/ha. L’utilisation d’une valeur moyenne départementale dans ces conditions rend le calcul de la dose totale prévisionnelle très approximatif, voire aléatoire. Il est donc important de réaliser des mesures à la parcelle.

Comment gérer des doses totales prévisionnelles faibles voire nulles ?

Face à ces reliquats élevés, l’impasse de l’apport au tallage des céréales était le premier réflexe à adopter cette année. Le deuxième va être de piloter les apports durant la montaison avec ou sans une mise en réserve selon les cas.

Les niveaux de RSH mesurés dans nos expérimentations ont rarement été aussi élevés, au point de conduire à une dose prévisionnelle nulle. Toutefois, en raison des risques d’imprécision de certains postes de fournitures, liés notamment à la prévision de minéralisation ou de lessivage de l’azote minéral présent dans l’horizon de profondeur, la sécurité conduit à apporter un minimum de 30 à 40 kg N/ha, au tout début de la montaison. A partir de ce stade, les besoins en azote de la plante augmentent très fortement et l’azote minéral apporté à ce stade est disponible immédiatement dans la couche du surface du sol.

Doses faibles à très faibles : privilégier l’apport début montaison quitte à réduire la mise en réserve pour le pilotage

  • si la dose totale est < 80 kg N/ha : pas de mise en réserve avant le pilotage, la dose totale est apportée début montaison (entre le stade épi 1 cm et 1 nœud).
    • si la dose totale = 100 kg N/ha et qu’un premier apport au tallage a déjà été réalisé : le complément sera apporté début montaison sans mise en réserve.
    • si la dose totale = 100 kg N/ha sans apport au tallage : 20 kg N/ha peuvent être mis en réserve pour le pilotage.

Cas des doses totales nulles : un pilotage s’impose

D’un point de vue réglementaire, en zone vulnérable, « le détail du calcul de la dose n’est pas exigé pour les cultures recevant une quantité d’azote totale inférieure à 50 kg N/ha ». Il est par contre nécessaire de justifier une dose totale supérieure à 50 kg N/ha par l’utilisation d’un outil de pilotage.

Concrètement, pour les situations à forts reliquats azotés conduisant à des doses totales d’azote égales à zéro, il est techniquement recommandé de faire un apport de 40 kg N/ha au stade épi 1 cm. Deux cas de figure se présentent alors :
• aucun outil de pilotage n’est utilisé : la parcelle recevra donc uniquement 40 kg N/ha début montaison.
• un pilotage est programmé pour un apport courant montaison : dans ce cas-là, si le diagnostic conduit à un apport complémentaire, cela valide à la fois le complément ainsi que la nécessité d’avoir réalisé un apport au préalable.

Le pilotage est donc incontournable en 2017

Dans ce contexte particulier où les reliquats azotés pèsent lourds sur les doses prévisionnelles, seul un diagnostic en cours de culture permettra d’adapter les apports aux réels besoin des cultures. Si les conditions sont favorables, plusieurs diagnostics peuvent être réalisés courant montaison avec certains outils, a fortiori pour les doses prévisionnelles nulles. Par exemple, il est possible de réaliser un premier diagnostic précoce – stade 2 nœuds – puis un diagnostic plus tardif au stade dernière feuille étalée, en veillant à ce que l’apport précédent ait été entièrement valorisé.

Pour les parcelles de blé dur, de blé améliorant et d’orge de printemps pilotées avec l’outil N-Tester, pensez à réaliser un témoin surfertilisé (+ 80 kg N/ha pour les orges ; + 100-150 kg N/ha pour les blés) au moment de l’apport principal.

Michel BONNEFOY, Christine LESOUDER, Baptiste SOENEN (ARVALIS – Institut du végétal)

 

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