Alors que les conditions sèches depuis près de trois semaines permettent des semis précoces pour toute la zone, elles sont moins favorables à l’efficacité des désherbages de prélevée. Leur utilisation reste cependant indispensable dans la lutte contre les graminées notamment. Certains produits offrent la souplesse d’un positionnement possible en post-précoce qui peut s’avérer pertinent si des conditions plus humides viennent à survenir.
Etat d’avancement des chantiers de semis
Les conditions globalement sèches et au-dessus des températures de saison depuis la fin mars ont permis des semis précoces dans plusieurs secteurs de la région (Beauce, Ile-de-France, voire Auvergne). Les semis battent maintenant leur plein dans toute la région. Si les semis les plus précoces (fin mars) ne devraient plus tarder à émerger, les implantations actuelles, si les pluies ne surviennent pas, risquent de lever de façon plus hétérogène en raison des sols qui se dessèchent.
Désherbage en pré ou post-précoce : les racinaires, indispensables pour la gestion préventive des graminées
Quelques rappels sur la conduite à adopter pour un désherbage réussi
Tout d’abord, il est important de bien repérer le stade du maïs afin de limiter au maximum un risque de sélectivité sur de jeunes plantes. On évitera ainsi toutes applications sur un stade pointant et on attendra le stade deux feuilles sur des maïs qui devront être en bon état végétatif. Dans ce cas, un report des applications de produits racinaires en post-levée précoce est à envisager.
Dans tous les cas, on cherchera à inventorier de manière précise la flore déjà présente, ou attendue sur la parcelle (espèce et stade de développement) afin de choisir les produits et composer les mélanges les plus adaptés à la flore en place. La présence assurée de graminées, tels que PSD (Panic, Sétaire, Digitaire) ou encore de ray-grass, impose quasiment l’application d’un produit racinaire en prélevée. Outre l’efficacité sur les premières levées, c’est essentiellement la rémanence de ces produits de la famille des chloroacétamides qui confère au programme sa robustesse. La dose d’application est gérée selon la nature de la flore, le degré d’infestation attendu et les types de sol. En effet, la gestion préventive des graminées limite la probabilité d’avoir recours en post-levée à des associations sulfonylurées + auxiniques sur des flores avec vivaces, associations délicates à manipuler en terme de sélectivité.
Ray-grass résistant aux sulfonylurées : le double chloroacétamide en prélevée souvent plus performant
La gestion des ray-grass résistants (dans le bassin parisien notamment) impose le recourt à la prélevée. Les résultats acquis récemment mettent en évidence une meilleure efficacité des associations de chloroacétamides à base de S-métolachlore et de DMTAP (Isard 1.2 + Dual Gold 1.6 ou Dakota P3 + Dual Gold 1.6).
Humidité du sol et efficacité des désherbages de prélevée
Les herbicides appliqués en prélevée nécessitent un cumul de 10mm de pluie dans les 15 jours qui suivent l’application pour garantir une efficacité optimale. Même si ces conditions ne semblent pas réunies cette année, si la pression graminée est forte dans la parcelle, il conviendra tout de même de réaliser l’opération en essayant de la positionner au plus près du semis pour bénéficier de l’humidité résiduelle. Comme le montre le graphique ci-dessous, en condition sèche, l’efficacité des chloroacétamides n’est pas nulle et limitera le risque d’avoir à gérer en post des situations non contrôlables par des produits foliaires (graminées résistantes notamment).
Figure 1 : Efficacité d’un chloracétamide appliqué en prélevée en fonction des conditions climatiques post traitement (notation à T+60jours)
Si la pression graminée n’est pas trop forte et que les produits le permettent, on pourra reporter l’intervention en post-précoce, éventuellement associée à des produits foliaires pour garantir une meilleure efficacité.
Gestion de flore classique en un passage : la prélevée renforcée ou la post-précoce
Sur ces flores les plus simples, l’objectif est de maîtriser les dicotylédones et de prévenir l’éventuel développement de graminées. Plusieurs approches sont possibles selon le degré d’infestation, la nature des sols et les objectifs du producteur en nombre de passages.
Prélevée seule renforcée
L’utilisation d’un herbicide à large spectre en prélevée du maïs dans l’optique de ne réaliser qu’un seul passage est une solution possible. Nous proposons l’utilisation de l’isoxaflutole (IFT – Merlin Flexx) en prélevée associé à un chloroacétamide. A la place de l’IFT, il est possible d’utiliser la pendiméthaline qui possède également un spectre large (Prowl 400 ou Atic-aqua). Pour une bonne efficacité, la pendiméthaline nécessite une humidité du sol suffisante et persistante. Ne pas utiliser en sol filtrant ou en cas de semis mal recouvert car la pendiméthaline est phytotoxique pour le maïs si elle vient au contact des racines (racines en « massue »). L’emploi de Camix seul ou renforcé par de l’IFT ou de la pendiméthaline peut constituer également une bonne stratégie. L’Adengo utilisé seul ou de préférence en association avec un chloroacétamide (Dual Gold) peut également être une alternative.
Cette stratégie présente l’avantage de ne réaliser qu’un seul passage. Elle peut néanmoins être mise en défaut lorsque les conditions d’activité des produits sont perturbées par la sécheresse en prélevée ou par la levée tardive de certaines dicots. Il est alors nécessaire de rattraper en post levée, le plus souvent avec une tricétone contre dicotylédones classiques.
Tableau 1 : Doses des antigraminées de prélevée selon le type de sol
La dose du produit commercial de prélevée doit être élevée pour être efficace mais modulée en fonction du type de sol. Entrent en ligne de compte : la teneur en matière organique (qui « bloque » la matière active) et/ou le type de sol (sol sableux ou filtrant, limon battant qui augmente le risque de manque de sélectivité de certaines matières actives). Les doses ci-dessus sont indicatives et peuvent être modulées selon la connaissance de la parcelle, l’historique de l’usage de ces produits, et les degrés d’infestation.
Postlevée précoce
Passer uniquement en postlevée peut constituer une alternative dans différents cas :
– si les conditions en post-semis – prélevée sont très mauvaises,
– si les semis sont très précoces,
– si l’on est sûr de l’absence de certaines graminées…
Le report en postlevée précoce (1-3 feuilles du maïs, adventices en cours d’émergence) d’associations à base de Dual Gold ou Isard avec une tricétone (Camix) et/ou une sulfonylurée constitue une option possible. La thiencarbazone-méthyl (Adengo) peut également être utilisée en association avec un chloroacétamide ou une sulfonylurée (nicosulfuron) en post-précoce pour ce type de flore. Ce type de stratégie, testé depuis des années dans les réseaux d’essais, présente l’avantage d’être moins sensible aux conditions climatiques que la prélevée seule. En effet, l’efficacité foliaire des produits, dans ce type de stratégie, vient contrebalancer un manque d’efficacité des produits racinaires en conditions sèches.
Lorsque la levée des adventices est avancée et notamment dès que les graminées ont dépassé une feuille, mieux vaut se reporter sur des associations de postlevée dans le cadre d’un programme à un ou deux passages.
Tableau 2 : Exemples de stratégies sur flore simple de dicotylédones classiques en prélevée renforcée ou en postlevée précoce
Prélevée renforcée (1) | Postlevée précoce | |
Dual G. 1.4 – 1.6 + Merlin Flexx 1.7 ou Prowl 2 ou Atic Aqua 1.8 Adengo 1.5 + Dual Gold 0.9 Adengo 2 Camix/Calibra 3.5 – 3.75 Camix/Calibra 3 – 3.5 + Prowl 1.5 ou Atic Aqua 1.3 Isard 1.2 + Merlin Flexx 1.7 ou Prowl 2 ou Atic Aqua 1.8 Dakota-P 3.5 ou traitement sur le rang au semis puis bineuse |
Camix/Calibra 2.5 – 3 + Nicosulfuron 12-20g (+ anti dicot ad hoc si flore difficile) Dual G 1.4 ou Isard 1.2 + Callisto 0.3 + Nicosulfuron 12-20g Adengo 1.5 + Dual G. 0.9 ou Nicosulfuron 12g Adengo 1.5 Elumis 0.7 à 1 ou Callisto 0.5 – 0.75 + Nicosulfuron 20-30g ou combinaison avec bineuse. |
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Yann FLODROPS (ARVALIS – Institut du végétal)
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