Le strip-till peut s’envisager avant le semis du maïs. Cette technique gagne en maîtrise et permet notamment de limiter le travail du sol. Retrouvez ses conditions d’application pour une implantation réussie de la culture.
Travailler le sol uniquement sur des bandes de 10 à 20 cm de large et à une profondeur entre 5 et 30 cm, voilà ce que permet le strip-till. Ainsi le bouleversement du sol est minimal, mais un lit de semences traditionnel est créé. Cette technique originaire des Etats-Unis a été mise au point pour limiter l’érosion. En France, de plus en plus d’agriculteurs s’y intéressent pour simplifier le travail du sol.
Limiter le travail du sol au lit de semences
Le strip-till permet d’implanter une culture dans un lit de semences conventionnel en limitant le volume de sol travaillé. Pour permettre la levée et le développement des cultures, les bases agronomiques sont très proches de celles des techniques traditionnelles.
Selon les conditions dans lesquelles l’outil est utilisé (type de sol, période de l’année, résidus végétaux, structure du sol, climat…) l’état structural obtenu peut être plus ou moins propice à l’installation de la culture. Le travail en bandes conduit à une différenciation entre rang et inter-rang. Si cet inter-rang n’a pas été travaillé au préalable, l’état de surface est proche de celui du semis direct avec des résidus végétaux en surface et l’absence de terre fine. Ceci peut contribuer à limiter l’érosion, l’évaporation et la germination d’adventices. A l’inverse la bande travaillée présente un état structural proche d’un pseudo-labour, les résidus de culture ou de couvert sont ainsi assez fortement enfouis et dilués dans le profil. Cependant, dans les cas de gros couverts de graminées, cela peut conduire à un sol creux difficile à rappuyer.
Des conditions d’intervention propres à chaque type de sol
En conditions trop humides (sol plastique), le strip-till peut créer un lissage dans le pourtour du passage de la dent, et des zones de rupture de structure entre zone travaillée et non travaillée. En cas de sol très sec et dur, il peut se créer une structure de sol trop grossière et éventuellement creuse.
Pour éviter ces inconvénients, les sols argileux sont à travailler suffisamment tôt, en automne en général.
Avec un travail habituellement à 15-20 cm de profondeur, le strip-till peut être suffisant pour corriger une compaction superficielle.
En cas de défauts de structure plus profonds (25-30 cm) le risque est de créer un effet dit « pot de fleur » avec un enracinement limité à un faible volume ; la zone compactée et non travaillée n’étant pas traversée par les racines. Dans ce genre de situation il faut soit envisager un décompactage adapté à cette profondeur, soit ajuster la profondeur de travail du strip-till pour lui permettre de fissurer les zones compactées.
Viser la création d’un vrai lit de semences
Le strip-till est capable de créer suffisamment de terre fine pour avoir un bon contact sol-graine. Mais pour cela il convient de respecter quelques règles :
♦ intervenir en conditions ressuyées,
♦ en sol argileux, permettre l’évolution naturelle de la structure en intervenant dès l’automne,
♦ en cas de travail peu de temps avant le semis, utiliser les éléments d’émiettement et de rappui sur la future ligne de semis.
Favoriser le ressuyage du sol
Le travail du sol sur le rang avec des résidus enfouis ou dégagés sur l’inter-rang, et un ressuyage facilité, sont favorables au réchauffement. La température du sol derrière strip-till est supérieure à celle d’un lit de semences issu des techniques sans labour avec travail superficiel, mais cependant inférieure à celle d’un sol labouré. Dans la plupart des cas, le passage du strip-till en favorisant le ressuyage du sol facilite des semis plus précoces lors de printemps humides. A l’inverse, en situation sèche, il est préférable de réaliser le passage quelques jours seulement avant le semis pour ne pas perdre l’humidité résiduelle.
Réunir les conditions favorables à l’implantation du maïs
La réussite de l’implantation du maïs est conditionnée par un peuplement correct et régulier et une levée homogène. Cela repose en particulier sur un bon contact sol-graine possible si le lit de semences n’est pas trop grossier et non encombré de résidus. Le strip-till peut y contribuer à condition de créer suffisamment de terre fine en jouant sur différents leviers :
♦ intervenir en bonnes conditions de ressuyage,
♦ intervenir assez tôt, parfois dès l’automne pour laisser « hiverner » en cas de sols lourds,
♦ adapter la vitesse de travail,
♦ utiliser les équipements complémentaires pour affiner et rappuyer,
♦ doubler le passage, certaines années, en fonction des conditions climatiques,
♦ adapter la date de passage au contexte d’humidité du sol au printemps pour éviter deux écueils : un lit de semences trop humide et trop grossier, ou trop sec, défavorable à une levée homogène,
♦ ne pas oublier qu’il faut au préalable une structure favorable à l’enracinement du maïs.
Une technique à découvrir, évaluer et apprivoiser
En région Rhône-Alpes, quelques agriculteurs pratiquent la technique strip-till depuis plus de 10 ans. D’autres s’y intéressent de près depuis quatre à cinq ans et intègrent cet outil après observations dans les itinéraires de travail du sol préalable au semis du maïs voire de tournesol ou du soja. Par ailleurs, depuis plusieurs années des expérimentations sont conduites sur cultures de maïs par ARVALIS – Institut du végétal et le Centre Régional d’Expérimentation Agricole Saint Exupéry (CREAS).
Le partage de l’expérience des uns, l’expertise acquise par l’expérimentation et les observations faites par les agriculteurs qui se lancent, contribuent à approfondir les connaissances régionales sur cette technique d’implantation. Une fois maîtrisée, cette technique offre une autre possibilité pour la réalisation des chantiers d’implantation des cultures de printemps.
Jean PAUGET (ARVALIS – Institut du végétal)