Les pluies et la fraîcheur de début de cycle ont laissé place à un stress hydrique précoce qui s’est prolongé durant l’été. Au final, les zones qui ont bénéficié de quelques pluies fin juillet/début août s’en sortent un peu mieux. Retour sur les faits marquants de la campagne.
Après cinq années d’érosion, les surfaces semées en maïs grain ont connu une hausse de l’ordre de 5 % en 2019 par rapport à la campagne précédente, atteignant 1,43 millions d’hectares. Cette hausse est généralisée sur l’hexagone, avec toutefois des hausses significatives sur certaines régions où des surfaces supplémentaires de maïs ont été implantées pour compenser les défauts de semis de colza.
En maïs fourrage, les surfaces emblavées en 2019, autour de 1,4 Mha, restent relativement stables par rapport à la moyenne quinquennale. Avec les difficultés climatiques qui ont affecté toutes les productions fourragères en 2019, le besoin en stocks pour la période hivernale a conduit à des transferts de récoltes prévues en grain vers le fourrage, que nous estimons à 50 000 ha environ.
Des semis échelonnés et un début de campagne au ralenti
Les semis ont été relativement étalés, débutant à la mi-mars pour s’achever à la mi-mai, du fait du retour des pluies et de températures froides. Un créneau favorable était possible après la mi-avril, mais la crainte d’attaques précoces de ravageurs, avec l’arrêt du traitement de semences insecticide de référence, a freiné le démarrage des chantiers
Les températures relativement fraîches du mois de mai ont ralenti le développement des maïs en début de cycle (carte 1). Les cultures se sont donc retrouvées plus longtemps exposées aux ravageurs, notamment aux corvidés, taupins et mouches, entraînant des re-semis pour plusieurs dizaines de milliers d’hectares. Dans d’autres parcelles, ces ravageurs ont affecté le peuplement, réduisant par conséquent le potentiel.
Les conditions climatiques sont restées peu favorables aux interventions herbicides jusqu’à début juin. De même, les créneaux pour les interventions de désherbage mécaniques ont été assez rares et les passages souvent trop tardifs, ont obtenu des efficacités parfois médiocres.
Carte 1 : Ecarts à la moyenne de la température sur le mois de mai 2019
Un fort déficit hydrique qui a débuté mi-juin
Après la fraîcheur du début de cycle, la météo du début d’été a de nouveau créé des conditions stressantes pour les maïs. Dès la mi-juin, les conditions chaude et sèche ont eu des effets sur le développement racinaire et l’indice foliaire. Pendant la floraison, ces stress hydriques, couplés à quelques stress thermiques, ont pénalisé la fécondation des épis.
Les premières restrictions d’irrigation ont été arrêtées dès le début du mois de juillet et se sont renforcées dans le courant de l’été, essentiellement sur le centre et l’est de la France (carte 2).
Dans les situations les plus difficiles, sols avec de faibles réserves en eau, très faibles cumuls de pluie, les gabarits de plantes sont affectés avant la floraison et la production de grain est fortement réduite (phases de floraison et de fécondation perturbées). Les pluies sont revenues tardivement, fin juillet à début août, et de façon inégale sur le territoire. Ainsi, au sud d’un axe La Rochelle – Colmar, ces pluies tardives ont pu localement sauver quelques situations en floraisons tardives et accompagner le remplissage des grains (carte 3).
La fin de cycle s’est déroulée sous un climat plus frais, avec un régime de pluie proche de la normale.
Carte 2 : Bilan des arrêtés de restrictions d’irrigation au 26 août 2019
Carte 3 : Cumul de pluies enregistré entre le 6 juin et le 31 août 2019
Un rendement national en maïs grain sous les 90 q/ha
Les conditions climatiques de l’année ont inévitablement limité les potentiels de production. Les résultats sont très hétérogènes entre les régions, mais également au sein d’une même zone de production. Les régions Alsace, Aquitaine, Midi-Pyrénées, Rhône-Alpes présentent des rendements en grain proches de 100 q/ha. Les semis tardifs et la pluviométrie estivale a en effet permis de maintenir des niveaux de productivité satisfaisant dans le Sud-Ouest.
Comme chaque année, nous observons des différences marquées entre maïs pluvial et irrigué. L’irrigation a encore prouvé son intérêt avec des rendements dépassant les 15 t/ha localement, même si les restrictions prises par arrêtés tout au long de la campagne n’ont pas permis d’assurer l’expression de ce potentiel.
En maïs grain, le rendement national est estimé à 89,3 q/ha (contre 96,7 q/ha en moyenne sur 5 ans). La production nationale devrait atteindre 12,3 millions de tonnes.
Maïs fourrage : des rendements de très inférieurs à proches de la normale
Du côté du maïs fourrage, les chantiers de récolte ont été plus étalés qu’à l’habitude : de mi-août, voire avant dans les secteurs les plus stressés, à mi-octobre dans les zones plus tardives et plus arrosées. Les rendements sont à la baisse un peu partout, de 30 à 50 % inférieurs à la normale jusqu’à des situations proches de la normale : de 6-7 à 17-18 t MS/ha. Les régions Pays de la Loire, Poitou-Charentes, Centre, Auvergne, Bourgogne-Franche-Comté et Lorraine sont celles où les maïs fourrage, très peu irrigués, ont le plus souffert de la sécheresse. D’un point de vue qualité, la variabilité est forte également, tant au niveau des gabarits des plantes que de la richesse en grain. Les teneurs en amidon peuvent être parfois très faibles. La digestibilité des tiges et des feuilles devrait être bonne à très bonne pour les maïs récoltés précocement. Pour les récoltes tardives (fin septembre, début octobre), il est encore tôt pour se prononcer mais la digestibilité devrait être en retrait du fait de plantes « vieillissantes ».
Michel MOQUET (ARVALIS – Institut du végétal)