Les linières sont actuellement aux alentours de 30 cm. Pour l’instant, les conditions météorologiques prévues pour les prochains jours laissent présager un risque de verse faible.
Sous l’action des températures clémentes de ces derniers jours, le lin est entré en phase de croissance active. Cette croissance accélérée pose la question du recours, ou non aux régulateurs pour limiter le risque de verse. Toutefois, l’application de régulateur n’étant bénéfique que dans les cas avérés de risque de verse, il convient de bien évaluer la situation afin de ne pas risquer d’amputer le potentiel des parcelles.
Retour sur les conditions climatiques
Pour faire suite à la précédente messagerie, voici un retour sur le cumul de température et de pluie suivant les secteurs (tableau 1). Bien que la semaine ait été plus clémente, le cumul de température du 28 mars au 27 mai 2019 reste toujours inférieur à celui de la médiane sur la même période pour les 20 dernières années.
Les cumuls de pluies sont eux aussi déficitaires par rapport à la médiane.
Pour rappel, 550 à 600 degrés cumulés en base 5 sont nécessaire pour atteindre le stade floraison, et environ 900 pour la maturité des fibres.
Tableau 1 : Cumul des températures et des pluies depuis le 28 mars jusqu’au 27 mai, comparé aux 20 années précédentes
Evaluer le risque de verse à la parcelle
Pour bien évaluer le risque de verse, il convient de prendre en compte les trois composantes : le climat, le sol et la plante (croissance, densité et stade).
Une grille d’évaluation (tableau 2) élaborée par ARVALIS permet d’apprécier les facteurs de risque au cours de la campagne. La somme de trois notes de 0 à 3 attribuées à chaque facteur (climat, sol et plante) donne une note finale comprise entre 0 (= risque nul) et 9 (= risque fort). La note obtenue permet alors de définir l’utilité d’une intervention.
Tableau 2 : Grille d’évaluation du risque de verse
Quelles sont les solutions disponibles ?
Les leviers agronomiques (densité de semis, choix variétal et fertilisation azotée) sont les premiers leviers à utiliser pour gérer le risque de verse d’une parcelle.
Cependant, ils peuvent être insuffisants. En dernier recours, la régulation chimique peut être envisagée (tableau 3). Attention toutefois, car l’application d’un régulateur entraîne des perturbations sur la croissance du lin et peut impacter négativement la quantité et la qualité des fibres.
Tableau 3 : Spécialités disponibles en régulateurs de croissance pour lutter contre la verse du lin fibre
• Ethéverse (éthéphon 480 g/l) peut être utilisé de 0,3 à 0,6 l/ha à partir de 40-50 cm. D’action rapide (24 à 48 h), il provoque un ralentissement temporaire de la croissance et s’utilise préventivement en situation de risques forts. Cela peut concerner les lins ayant une croissance importante (> 4 cm/j) avec des orages imminents. Une application précoce peut nécessiter une ré-intervention en cas de risque persistant. Attention aux effets secondaires : expression de l’oïdium, retard à maturité, stérilisation des fleurs… Son utilisation est, de ce fait, déconseillée quand l’itinéraire vise la production de semences.
• Toprex (paclobutrazole 125 g/l et difénoconazole 250 g/l) : la dose efficace est comprise entre 0,03 l/ha et 0,2 l/ha. Son utilisation est délicate car la réaction des plantes est très dépendante des conditions de l’application (dose, stade, rythme de croissance…). La dose est à adapter en fonction du stade du lin et du risque. Son action n’est pas immédiate (48 à 72 h).
– En cas de risque moyen à fort à un stade précoce, la dose d’utilisation n’excèdera pas 0,05 l/ha.
– En cas de risque moyen à fort du stade 70-80 cm à préfloraison, une dose de 0,1 à 0,15 l/ha sera appliquée.
Le tableau 4 présente les doses en fonction du stade du lin et du niveau de risque. L’inadéquation de la dose au stade du lin peut provoquer un blocage brutal et irréversible de la croissance des plantes.
Tableau 4 : Correspondance des doses (l/ha) de Toprex en fonction du stade du lin et du niveau de risque
• Caryx (30 g/l de metconazole + 210 g/l de mepiquat-chlorure) s’utilise à la dose de 0,4 à 0,6 l/ha en cas de risque précoce (50/60 cm) et/ou aux doses de 0,6 à 0,8 l/ha en cas de risque plus tardif (préfloraison).
Exemples de stratégie de lutte contre la verse
Voici une proposition de choix stratégiques appliqués à la parcelle pour gérer le risque de verse (tableau 5).
Tableau 5 : Exemples d’interventions possibles en fonction du risque évalué
Une double application peut parfois être nécessaire (cf. 2016, fort risque de verse tout le long du cycle), dans ce cas combiner les deux situations : niveau de risque précoce + niveau de risque tardif.
Cynthia TORRECILLAS (ARVALIS – Institut du végétal)
Clémence DARLEY (ARVALIS – Institut du végétal)